Fiteiro vient du mot fitas en portuguais, qui sont des rubans de tissu
servant à orner les robes des petites filles. Autrefois, le fiteiro
était le marchand ambulant qui vendait ces rubans. Aujourd'hui,
au nord du Brésil, un fiteiro est une petite baraque permettant
à une économie parallèle de survivre en vendant diverses
marchandises. C'est l'une des formes les plus réduites et éphémères
d'occupation de l'espace public.
Le Kiosque à Culture est une sculpture sociale
qui renferme une utopie: celle d'un lieu culturel qui est un " non-lieu
", défini par la communauté dans laquelle il est implanté.
Il s'agit de mettre ce lieu à disposition de divers groupes de
population afin que ceux-ci maintiennent, retrouvent ou encore recréent
les liens culturels qui les unissent. Ce kiosque est un abri contre l'oubli.
Il possède une structure polymorphe et modulable qui peut tour
à tour se transformer en grande table de travail, en cabane, en
atelier ouvert, en théâtre, etc.
J'ai inauguré le Fiteiro Cutural pour la première
fois pendant l'échange artistique helvetico-brésilien Laboratoire,
à João Pessoa en 1998.
Il était installé sur la plage. Je pouvais y peindre, y
lire, ou me prélasser dans un hamac et communiquer avec le public,
avec les artistes suisses ou brésiliens. Le principal objectif
était d'être à la disposition des gens et de créer
des activités différentes de celles que l'on rencontre généralement
dans les kiosques que l'on trouve sur les plages et dans les rues de cette
ville du nord-est du Brésil. Par la suite, le Fiteiro Cultural
est devenu une uvre artistique conçue à plusieurs
mains : il a été construit dans plusieurs pays en collaboration
avec d'autres artistes et d'autres curateurs ; chaque nouveau kiosque
a bénéficié d'un nom propre, dans la langue correspondant
à celle de la communauté dans laquelle il se trouvait installé.
Petit à petit, il a commencé à faire partie intégrante
et à s'incorporer à l'espace de ces communautés bien
distinctes et spécifiques, comme par exemple, celle des gitans
Roms de la périphérie d'Athènes ou celles des graffiteurs
new-yorkais.
A chaque expérience, le Kiosque à Culture
prend sa dimension dans le rôle qu'on lui attribue, et dans sa fonction
culturelle, et de ce fait, il possède un potentiel renouvelable
à l'infini. Ses usagers sont à la fois metteur en scène
de leur propre savoir et de leurs références, ils sont aussi
les acteurs et les spectateurs de ce qu'ils incarnent: leur mémoire
et leurs aspirations.
C'est pourquoi le Kiosque à Culture est perpétuellement
sur le point d'être créé et réinventé.
C'est à dire qu'à chaque fois, je suis spectatrice de mon
travail, et je découvre une nouvelle uvre.
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